Oui c’est à toi que je parles, toi qui depuis les attentats de Paris estime que tu peux (voir même que tu dois) dire tout haut ce que tu penses tout bas. Toi qui te sens l’héritier de Voltaire, Beaumarchais, et même Desproges que tu cites jusqu’à plus soif. Je te parles à toi parce que tu es UN PEU a coté de la plaque et que tu commences à bien me saouler, à mélanger tout, et son contraire sous fond de peur de l’autre et de préjugé décomplexé.
Je parles de toi, homme de radio, femme de presse, toi le visage au dessus du pupitre du journal télévisé, qui t’indignes du manque de tolérance de certain, tout en insistant pour que la justice soit sans appel contre ceux qui ont refusé de faire une minute de silence à laquelle ils ne croyaient pas.
Tu me dis que tu es Charlie, que tu es prêt à tout pour cette liberté d’expression chérie que finalement tu méprises tant tu ne la comprend pas.
Toi ce qui t’emmerdes c’est de ne plus pouvoir parler des pédés qui feront de mauvais parents sans subir un regard assassin de la part de ton collègue de bureau à qui tu fais remarquer (mais c’est pour rire) qu’il à une démarche de fiotte. Tu te sens limité dans ton droit d’entendre une bonne blague sur les arabes voleurs de mobylettes. Mais tu les aimes bien pas vrai ? parce que dans le fond même si tu trouves que les noirs sont de grand enfants, tu n’as aucune objections à ce qu’ils prennent ta commande au McDo… même si tu préfères quand c’est la petite jeune fille dont l’abondante poitrine t’inspire cette tirade grivoise que tu lui lance sans ménagement tandis qu’elle tourne le regard ailleurs dépité (après tout tu n’es que le 4eme aujourd’hui). « Oh ça va on rigole ! » penses tu en te disant qu’elle aurait bien besoin de ce décoincer la gamine. Tu serais même prêt a t’en occuper : a son age elle doit être facilement impressionnable (ah ah ah ! qu’est ce qu’on se marre hein ?).
Le souci vois-tu c’est que tes propos à la con ne sont pas des avis, ce ne sont même pas des idées. Ce sont des agressions, des dénis de l’autre et le plus souvent asséné avec la légèreté d’un diplodocus. Et oui cher phallocrate sans génie qui se prend pour Sacha Guitry, oui toi la grenouille de bénitier bien pensante qui se complait dans sa suffisance et qui donne des leçons à ceux qui n’en ont pas demandé, ton propos que tu veux si salutaire à mon âme que tu me l’imposes alors que je fais tranquillement autre chose n’est PAS indispensable à la continuité de mon existence.
Je peux tout à fait vivre sans savoir ce que tu penses, qui tu as envie de baiser (ou pas), ce que tu estime bon pour les gays, les noirs, les lesbiennes, les lesbiennes noirs, les chinois gays et que sais je encore (oui je sais, je tourne un peu sur les même minorités). Il est parfaitement concevable pour moi de ne pas prendre en compte ton avis sur l’avortement, la peine de mort et la monté justifié du FN.
Les uns les autres pouvons exprimer des idées, c’est une chose qui ne se discute pas. Mais des idées, des opinions, ce n’est pas balancer des mots sans argument. Ce n’est pas non plus considéré qu’un contre argument est une censure. L’art de la rhétorique fait cruellement défaut à mes contemporain, et toi aussi je trouve que parfois tu ouvres ta gueule pour rien si ce n’est cracher ta haine, ton inculture et la médiocrité de ta pensé. Réfléchis bien, la censure c’est lorsque le pouvoir empêche la libre expression : tu trouves tes propos si subversif que ça ? tu te crois si anticonformiste alors que tu es l’incarnation du système ?
Oui c’est très prétentieux de dire ça, parce que ça sous entend que de mon coté je suis titulaire de pensées exclusivement pertinente et parfaitement élaborée. Dieu merci il n’en est rien, car comme toi je suis un peu con, un peu raciste, un peu homophobe. Oh pas méchamment hein, un peu comme toi, parce que je me dis que tu as un bon fond. Mais parfois c’est terrible à quel point tu es con. On est tous très cons, même les noirs, même les gays, les femmes, les vieux, les gens de droite et de gauche, les écolo, les bobo hipster, les pauvres, les bénévoles du resto du cœur, les vendeuses de chez Séphora, les artisans boulangers, les croyants de tous bords… on est tous très cons, mais certains on la mauvaise idée de l’oublier.
La liberté d’expression est celle d’exprimer des idées, d’avancer des arguments et des analyses. Ça n’a rien à voir avec des vérités toutes faites lancées entre la poire et le fromage, ce n’est pas le fait de cautionner des clichés, ni d’humilier quelqu’un sans respect. Être libre de parler c’est un grand pouvoir qui n’est pas si évident que ça.
Et comme tu le sais : un grand pouvoir implique de grande responsabilité